COURS DE
TECHNIQUES IMMUNOLOGIQUES


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Chapitre III - La réaction Ag-Ac
           
            III - 1 - Observation directe de la réaction Ag-Ac :

            III – 1 – 1 - Méthodes d'agglutination
:

            III - 1 - 2 - Méthodes de précipitation :

           
III - 1 – 3 - Méthodes associées à l'électrophorèse :
            III - 2 - Techniques avec anticorps marquées
            III - 2 - 1 - Techniques enzymatiques :
            III - 2 - 2 - Techniques d'immunofluorescence:
           
 

III - 1 - Observation directe de la réaction Ag-Ac :

III - 1 – 1 – Méthodes d’agglutination :                                                                                                  

La réaction d’agglutination permet de visualiser la fixation Ag-Ac. Si l'antigène est placé à la surface de grosses particules (bactéries ou parasite par ex), les Ac peuvent provoquer leur agglutination. Il s'agit de la liaison simultanée des molécules d'Ac à deux particules identiques. On distingue :

-   l'agglutination active directe et indirecte : les épitopes sont possédés par les grosses particules. Les anticorps précipitants sont des anticorps primaires dans la technique directe et dans la technique indirecte il faut des anticorps secondaires anti-Ig pour former le réseau.

-         l'agglutination passive directe et indirecte : les épitopes sont ici portés par de petites molécules greffées à la surface des grosses particules (biologiques ou inerte). Le couplage des antigènes peut être obtenu par divers procédés : traitement par le chlorure de chrome, la benzidine bisdiazotée et surtout, actuellement, le glutaraldéhyde et les carbodiimides.

Les réactions d’agglutination sont particulièrement utilisées pour le sérodiagnostic des affections microbiennes et le typage des groupes sanguins (hémagglutination). La découverte fondamentale des quatre groupes sanguins du système ABO, revient à Landsteiner en 1901. Il conclut à l’existence de deux antigènes du groupe sanguin «A» et «B»; les hématies d’un sujet donné portent soit l’un (A), soit l’autre (B), soit les deux (AB), soit aucun (O). Ces antigènes sont des glycoprotéines constitués de chaînes hétérosaccharidiques multiples (L-fucose, N-acétyl galactosamine, D-galactose, N-acétyl glucosamine), branchées sur une sérine ou une tyrosine d’un squelette polypeptidique. Landsteiner conclut également à la présence d’alloanticorps anti-A et anti-B chez les sujets qui n’ont pas l’antigène correspondant :

      

III - 1 – 2 – Méthodes de précipitation :                                                                                          

Lorsque des quantités suffisantes d'Ac se sont liées à des Ag solubles, on peut voir apparaître un précipité formé d'agrégats de molécules d'Ag réunies par l'Ac. Lorsqu'on ajoute différentes quantités d'antigène à une quantité fixe d'anticorps (ou l'inverse), un complexe se forme suite à la liaison des deux réactifs. En culottant les complexes formés et en mesurant les quantités d'anticorps ou d'antigène restant dans les surnageants, on définit trois zones :

La quantité de précipité dépend des quantités d'anticorps et d'antigène :

-                           Au départ, il ne se passe rien (effet zone) : pas de ponts entre les Ag par excès d'Ac;

-Puis apparaît un trouble, un précipité : zone d’équilibre entre Ag et Ac formant un réseau moléculaire ;

- Enfin, ce trouble disparaît : dissociation du réseau par excès d'Ag.

Ainsi, en présence d'excès d'une des deux molécules, on accroît la proportion de complexes plus petits et donc moins précipitables.

III - 1 – 2 - 1 - Précipitation en milieu liquide 
a.       Le ring-test ou test de l'anneau : Les deux phases (phase inférieure contenant l’anticorps et phase supérieure contenant l’antigène) ne sont pas mélangées. L’antigène descend lentement au contact de l’anticorps pour former un complexe Ac-Ag à la zone d’équilibre de la courbe de précipitation. La position de l'anneau indique la présence de l'Ag ou de l'Ac que l'on recherche. Cet ancien test, surtout qualitatif, est un peu quantitatif par la position de l'anneau : plus il y a d'antigène, plus l'anneau est bas.

    b.     Techniques de néphélémétrie : Un rayon laser traverse le tube contenant d’éventuelles particules du précipité. La diffraction de la lumière par les particules (nephelos = nuage) est mesurée à la sortie. Plus il y a de précipité Ac-Ag, plus il y aura de signal sur le photomultiplicateur (appareil qui mesure la diffraction). La mesure, rapide et automatisée, permet un dosage quantitatif.

               

III - 1 - 2 – 2 - Précipitation en milieu solide : Le gel d'agarose (3% à 10%) utilisé retient les précipités dans ses mailles.

a. Technique d'Ouchterlony ou de double immunodiffusion : L'agarose est coulé sur une plaque de verre de quelques millimètres d'épaisseur. On y découpe deux puits à l’emporte-pièce : dans l’un des puits est placé un anticorps et dans l'autre puits est versé un antigène. Un précipité apparaît dans la zone d’équilibre. Ce test est qualitatif et semi-quantitatif : l'arc se déplace selon les concentrations relatives pour se situer le plus près du puits où la concentration est la plus faible. Quand la réaction est terminée (24 à 48 h), on peut laver l'agarose dans du sérum physiologique sans altérer le complexe immun retenu par le maillage de l’agarose, puis colorer les protéines du complexe immun pour révéler la bande de précipité.

Lors de l’utilisation d’une série de puits disposés en couronne au tour d’un puits central, la lecture peut révéler :

-             Une identité totale : lorsque les deux lignes de précipitation se rejoignent et fusionnent pour ne former qu’une seule ligne continue, donc les deux puits contiennent des antigènes identiques qui diffusent à la même vitesse et possèdent le même poids moléculaire.

-       Une non identité : les deux préparations antigéniques sont différentes (leurs déterminants sont différents). Chaque système de précipitation évolue pour son propre compte et les deux lignes de précipitation se croisent.

     -             Une identité partielle : dans ce cas, les deux puits contiennent des antigènes qui présentent des déterminants antigéniques identiques, mais qui diffèrent par quelques déterminants particuliers que possède un des deux antigènes ce qui entraîne la formation de l’éperon.

Pour plus de détails voir l'animation suivante : cliquez ici

b. Technique de Mancini : On utilise un gel d'agarose qui contient déjà un anticorps :

o        des puits sont percés dans lesquels on met l'antigène ;

o        l'antigène diffuse dans le gel, déplaçant la zone d'équilibre ;

o        après 48 heures les rayons des anneaux de précipitation, qui se sont progressivement éloignés du puits, sont mesurés car proportionnels à la quantité d'antigène.

On peut réaliser ainsi une courbe d'étalonnage et obtenir un résultat quantitatif.


III - 1 – 2 - 3 – Méthodes associées à l'électrophorèse:                                          

a. Immunoélectrophorèse de Grabar et Williams : Les étapes sont les suivantes :


- une lame de microscope est recouverte d'agarose et percée de deux puits ;
- on sépare des protéines grâce à un courant électrique (ex : électrophorèse de sérum humain);
- on découpe ensuite une gouttière au milieu de la lame, dans laquelle on verse de l'anti-sérum polyclonal animal "anti-sérum humain" reconnaissant pratiquement toutes les protéines du sérum humain ;
- après diffusion, on obtient différents arcs de précipitation qui peuvent être colorés et comparés.

Remarques :

-         La même chose peut être faite avec un seul anticorps.

-         Cette technique est surtout appliquée dans l’analyse des liquides biologiques : LCR, urine, sérum, plasma… etc.  

b. Immunofixation : L’immunofixation est une technique qui permet l’identification des chaînes lourdes et légères des immunoglobulines monoclonales dans le sérum ou dans l’urine.

Première étape: électrophorèse, (mais cette technique impose de faire migrer le sérum à tester plusieurs fois (autant de fois qu’il y aura d’anticorps utilisés dans la deuxième étape)). La première piste de migration, après fixation de l’ensemble des protéines, sera l’électrophorèse témoin du patient.

Deuxième étape: les anticorps ne sont plus ajoutés dans une rigole, comme précédemment, mais ils sont déposés individuellement sur chacune des 5 autres pistes de migration. La présence de l’analyte (ex : immunoglobuline monoclonale) se traduit par l’observation d’une bande étroite après coloration des complexes précipités.

L’immunofixation tend à supplanter l’immunoélectrophorèse en raison de sa rapidité d’exécution (moins de 2 heures), et surtout en raison de sa plus grande facilité de lecture.

Dans la figure ci-dessous, l’examen par immunofixation révèle la présence d’une immunoglobuline monoclonale G de type kappa migrant conjointement aux protéines de la zone des gammaglobulines.

 

III - 2 - Techniques avec anticorps marqués :

III - 2 - 1 – Techniques enzymatiques :                                                                                                  

L’enzyme est accrochée sur la partie Fc des Ig (monoclonaux ou polyclonaux) comme marqueur, la partie Fab restant libre. L’enzyme permet de transformer une substance incolore en une autre, colorée. La visualisation se fait par technique directe ou indirecte (succession de marqueurs, amplification du signal). Il existe plusieurs variantes ou schémas réactionnels basées sur un concept de base identique. Voir l'exemple donné dans le tableau des ressources ou cliquez ici.

Test ELISA (Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay):

a. Technique directe : les techniques ELISA sont réalisées sur plaquettes en plastique de 12 x 8 = 96 puits de 250 µL à fond plat (pour permettre une spectrophotométrie) ;


b. Technique indirecte : les anticorps recherchés se fixent sur l’antigène qui tapisse des puits; les éventuels anticorps liés résistent au rinçage puis sont la cible d’anticorps anti-anticorps porteurs d’une enzyme qui réagit avec le substrat: le résultat est alors positif.

c. Autres variantes :

ELISA sandwich :

ELISA compétition :

Ce test utilise l'inhibition compétitive par un Ac non marqué (il s'agit souvent d'un Ac monoclonal ou d'un mélange d'Ac monoclonaux) de la liaison entre un Ac marqué à un Ag correspondant. L'Ac non marqué (Aco) et l'Ac marqué (Ac*) se fixent à l'Ag dans les proportions de leur mélange. La quantité du complexe Ac*-Ag diminue au fur et à mesure qu'augmente la quantité d'Aco dans le milieu. Une courbe étalon établie avec des quantités connues et croissantes d'Aco pour une même quantité connue et constante d'Ac*, permet par simple report de connaître une quantité inconnue d'Aco contenue dans un liquide biologique.

Applications :

-   Recherche et dosage d'anticorps pour le diagnostic de maladies infectieuses (sérologie bactérienne) : en parasitologie (toxoplasmose…) et en virologie (virus de l'hépatite B, virus du SIDA…), également recherche d’Ac en auto immunité… etc.

-          Dosage spécifique de certaines protéines plasmatiques : IgE (totales et spécifiques), ferritine, dosages hormonaux (hCG), dosages de médicaments, recherche de marqueurs tumoraux: alpha-foetoprotéine… recherche d’Ag bactériens, viraux, fongiques, parasitaires

Western Blot (blot = buvard):

L’objectif de cette technique, qui est une variante du test Elisa, est de trouver une protéine dans un mélange complexe.

Rappel: Southern - blot pour l’ADN; Nothern - blot pour l’ARN; Western – blot pour les protéines.

Etapes de la technique :

o        séparation du mélange de protéines dans un gel de polyacrylamide par électrophorèse ; la migration des protéines est en fonction de leur taille, indépendamment de leur charge électrique (protéines toutes chargées négativement par le tampon SDS = sodium dodecyl sulfate) ;
o        migration en parallèle de protéines de tailles connues (échelle en fonction des tailles moléculaires) ;
o        coloration du gel à l’argent ou au Bleu de Coomassie ;
o        Blot ou " buvardage " : transfert par capillarité des protéines sur une membrane de nitrocellulose ou de nylon ;
o        surcoating puis lavages de la membrane ;
o        ajout du substrat (H2O2) et du chromogène, différent de celui utilisé pour le test Elisa (diaminobenzédine) mais on peut aussi utiliser des anticorps marqués avec un isotope, puis un film photo ;

Résultat : on obtient des bandes, ce qui permet de connaître la taille et la nature des protéines.

            Remarque : cette technique est utilisée pour confirmer un premier test HIV positif en ELISA, pour vérifier que les anticorps identifiés sont effectivement spécifiques d'antigènes de ce virus.

III - 2 - 2 - Techniques d’immunofluorescence                                                                                      

Principe : un anticorps est couplé à un fluorochrome (isothiocyanate de fluorescéine ou rhodamine …) qui est excité  par un rayon UV et émet une lumière fluorescente (verte ou rouge …) ; observation au microscope à UV. 

En utilisant des sections de tissus (qui contiennent un grand nombre d’antigènes), il est possible d’identifier en une seule fois des anticorps dirigés contre plusieurs antigènes différents. Plusieurs auto-anticorps ont été dénombrés, chacun spécifique d’une protéine ou nucléoprotéine. Lorsqu’un anticorps est dépisté, il est titré et son aspect en fluorescence décrit. Celui-ci peut être soit homogène, homogène à renforcement périphérique, moucheté ou nucléaire.

Immunofluorescence directe : une section est coupée sur un cryostat à partir d’un morceau de tissu congelé. La solution standard d’anticorps fluorescents est appliquée sur la coupe sous forme d’une goutte, incubée et éliminée par lavage. L’anticorps fixé est ensuite révélé sous microscope. Le schéma de fluorescence est caractéristique pour chaque antigène tissulaire ou cellulaire.

L’IFD est utilisée en anatomie pathologique pour reconnaître les marqueurs tumoraux, mais aussi pour visualiser ou rechercher par exemple: l'actine du cytosquelette dans des cellules ou des tissus; HIV sur les membranes cellulaires de cellules isolées ou de tissus; Les complexes immuns constitués d'anticorps anti-ADN et d'ADN déposés le long des membranes basales cutanées du Lupus Erythémateux Disséminé. Dans ce cas, les anticorps marquée anti-immunoglobulines humaines sont déposés sur des coupes à la congélation d'une biopsie de la peau du malade.

Immunofluorescence indirecte sur lame : elle est essentiellement utilisée pour mettre en évidence des Ac dans un liquide biologique. Dans ce cas l’anticorps appliqué sur la section sous forme d’une solution est révélé par un anti-Ig fluorescent.

L’IFI est surtout appliquée à la recherche d’Ac soit en sérologie bactérienne et virale soit dans la découverte d’auto-anticorps.

Exemple d’application (diabète) : L’objectif est la recherche d'un marquage sur une coupe de tissu. L’exemple est celui du diabète où les îlots de Langerhans peuvent être reconnus par les anticorps anti-îlots de Langerhans des patients:

    • congélation dans l'azote liquide d’un pancréas de rat ;
    • coupes de 5 µm d'épaisseur, à -30°C, avec un cryomicrotome : ceci préserve les antigènes qui ne sont pas abîmés ;
    • fixation des coupes sur les lames de verre du cryomicrotome par le simple passage de - 30°C à +20°C qui équivaut à un séchage rapide ;
    • délimitation d’un cercle hydrophobe autour du tissu avec de la graisse de silicone afin d’éviter la perte de réactif ;
    • ajout du sérum du patient, incubation, puis 3 lavages à tampon salin pendant 5 min qui éliminent les anticorps non fixés aux antigènes du tissu pancréatique ;
    • ajout d’anticorps marqués (sérum animal) anti-immunoglobulines humaines ;
    • lavages, puis observation au microscope à UV ;
    • Résultats : les îlots de Langerhans apparaissent brillants.

- Autre exemple d’application de la technique indirecte : recherche des anticorps anti-ADN caractéristiques du Lupus Erythémateux Disséminé (pommettes inflammatoires formant un " masque de loup ", problèmes cardiaques, rénaux) :

    • le sérum du patient est testé sur des coupes de 4 µm de rein de souris, riches en cellules nucléées, ou sur des étalements de lignées cellulaires en culture, dont la membrane a été perméabilisée
    • après incubation et lavage, les lames sont lavées puis incubées avec un anticorps anti-immunoglobulines humaines, marqué à la fluorescéine
    • la présence d’anticorps anti-ADN dans le sérum du patient permet la fixation des anticorps marqués et "illumine" les noyaux avec un aspect particulier, très homogène.
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Auteur :
Mme BOUMENDJEL-Messarah Amel
(email : amelibis@yahoo.fr)
Docteur en immunologie. Maître de conférences (A)
Laboratoire de Recherche en Biochimie et Microbiologie Appliquées. Unité d’immunologie. Département de biochimie. Faculté des Sciences.
Université Badji Mokhtar d’Annaba (Algérie).